lundi 7 avril 2008

Petit cours de commerce, tome 2

J'avais raconté ici le talent du loueur de voiture pour nous refiler une épave au prix d'une Mustang Cabriolet.

Aujourd'hui, alors que, de retour à San Diego, nous sommes allés voir s'il y avait moyen de se faire rembourser la water pump cassée chez nos amis les escrocs de AutoRent (ou Rent4less, chez qui il ne faut pas louer non plus, c'est les mêmes)...

Level One

Ce fut un moment fascinant. On a eu la, euh, chance, de retomber sur n°21 (là, c'est pas comme Darrell, on connait pas son prénom), notre loueur, avec qui on a eu une bonne demie-heure de discussion agitée pour savoir si, oui ou non, il nous avait dit qu'on pouvait sortir de la zone théorique d'utilisation de la voiture. Son argument étant "je vous avais dit que vous n'aviez pas le droit d'aller dans l'Utah", notre argument étant "oui, mais votre voiture est quand même pourrie, Utah ou non".

La partie s'orientait vers un pat, notre ami ayant, certes, le contrat, que j'avais, certes, signé, pour lui, tandis que nous avions pour nous le fait que, bon, on lui avait dit qu'on faisait un road trip, et le fait que, malgré tout, il savait, et nous savions, qu'il nous avait loué une poubelle.

Ce que, paradoxalement, il reconnaissait, tentant même d'en faire un argument :"mais c'est bien parce que nos bagnoles sont pourries qu'on n'autorise pas la sortie du comté de San Diego, et je vous ai bien dit que c'était limité au comté de San Diego" !
Oui, n°21, mais tu ne nous a pas dit, à ce moment, "je n'ai que des épaves, louez ailleurs"...

Bref, il nous propose un moyen terme, on vous rembourse 400 $, vous nous en filez 150 pour la sortie de la zone de couverture, et on en parle plus. OK, admettons, il va donc chercher le fameux owner, sur lequel il n'a cessé de dire du mal pendant ce long débat.

Level Two

Revient donc un autre employé, celui-ci étiqueté Rent4less (qui sont aussi des escrocs, donc), qui s'installe sur l'ordinateur, tape des machins, et, au bout de deux minutes à faire semblant de taper des trucs (probablement pour regarder sur google maps ou on était), nous explique que :

1) On a commis une grave infraction, très grave, en allant en dehors de la zone autorisée
2) La pièce, et ben c'est même pas une genuine Ford replacement, donc, bon, c'est limite si on lui a pas abîmé sa voiture.

D'ou il conclut que :
La pièce, on doit la payer, il remboursera pas. Et qu'on lui doit 450 $ de mileage parce qu'on a été là ou c'était interdit.

C'est là qu'on entre dans le sublime de l'arnaque (et ce n'est qu'un début !!!).

Il nous fait donc une offre : soit on paye 250 $ maintenant, et on oublie tout ça, soit ils transmettent le dossier au legal department, qui nous poursuivra jusque dans la Toundra sibérienne s'il le faut pour récupérer les sous.

Mouais. On est des bonnes poires, mais là, quand même, y'a des limites. Je lui explique donc que, pas de problèmes, qu'il transmette le dossier, et s'il pouvait me confirmer qu'il y aura bien des navettes pour l'aéroport mercredi matin ?

Alors, certes, il n'est plus question maintenant de récupérer de l'argent, mais il prend conscience que pour nous en soutirer, ça ne sera pas si facile qu'il l'espérait. On n'est, en somme, que des demies-bonnes poires. Assez naïfs pour louer des poubelles par tendresse et pour trois semaines, pas assez pour payer une deuxième fois.

Le boss de fin de niveau


Il va donc chercher son chef. Le patron, pourtant jusqu'ici officiellement ailleurs, le Capo dei Capi, The Owner.

Qui arrive, et qui correspond à ce qu'on imagine : chemise blanche un poil ouverte quand même, gourmette, cheveux gominés, accent prononcé. L'ambiance Tarantino est plus que là, pour le coup, surtout quand le mécanicien, 1M60, 110 kilos, le t-shirt gras, et muet (ou en tout cas non anglophone) vient à ses côtés.

Gloups.

Là, ça devient très très très tendu. On n'est plus à ergoter à 50 dollars par ci par là, ça devient menaçant. Et on ne rigole plus. Le boss explique qu'on a fait un truc très grave (oui, ça, on sait), que ça ne va pas se passer comme ça, et me demande les clés pour voir le kilométrage pour qu'on lui paye le mileage fee.

J'ai pas trop, trop envie de lui refiler les clés, là, comme ça, sans plus d'explications. On a encore des bagages dans le coffre, on est à 30 kms de la maison donc rentrer à pied, ça me tente moyen.

Jusqu'ici, on marquait des points, particulièrement en leur rappelant que les pneus slicks ne sont pas légaux en Californie. Là, on perd du terrain. Je tente de proposer "on oublie tout, on s'en va, on se fait pas rembourser", mais là c'est plus une option. Le patron s'est déplacé, ça va pas être pour rien. Je ne veux pas lâcher les clés, et on a encore deux jours de location, après tout.

"Fine ; then I'll declare the car stolen". Gloups. Je lâche les clés de la voiture, entre autres grâce à Jérôme, qui me fait remarquer que ça deviendrait un peu tendu, de rouler à bord d'une voiture volée.

La voiture n'étant pas garée dans les 10 mètres, The Boss donne la clé au Muet, pour qu'il vérifie le mileage et les pneus. Je l'accompagne, j'ai des Adidas Vintage dans le coffre, Cécile me suit, héroïquement, Jérôme reste, avec le 911 sur le Speed Dial pour le cas où.

Le Muet démarre sur les chapeaux de roue, et je nous vois (vraiment, pas juste pour rire) finir enterrés dans le désert ou avec des chaussures en béton au fond de la rade de San Diego. Le ding-ding-ding de sa ceinture non attachée n'aide pas à me détendre vraiment.

On fait le tour du pâté de maison, histoire de pouvoir se garer à proximité de l'agence, et, heureusement, il s'arrête. Descend, constate l'état des pneus, et part rendre compte au Boss.

Nous sommes vivants. Et c'est déjà pas si mal.

Ca turbine dur dans l'office du Capo. Finalement, il sort avec une nouvelle proposition, du genre qui ne se refuse pas : le mileage fait qu'on lui doit 525 $, mais, comme il veut être conciliant, lui nous en doit 400. On lui fait une CB de 125$ et tout le monde est content.

L'heure est à la détente. Je lui explique que, bon, j'avais mal compris pour les clés, c'est pour ça, c'était pas personnel, il comprend bien, il admet que, oui, sa voiture est une épave, on devrait arriver à un deal.

125 $, donc. Il croit encore qu'on est des poires, quart de poires, sans doute ?

En même temps, pas plus envie que ça de partir pour un quatrième round. A ce jeu là, ils seront toujours plus forts que nous, c'est un 3 contre 3, mais ils sont pros, leurs attaques sont coordonnées, nous on est amateurs, et dans 48 heures on repart. Donc l'option "on vous fait un procès", on l'a pas vraiment.

J'en reviens à mes 125 $ : le chiffre ne correspond à aucun mileage, juste à une somme raisonnable. Ca veut dire que l'état des pneus, entre autres, joue en notre faveur, et compense assez largement le fait qu'on a pas respecté les termes du contrat.

On reprend l'ascendant. On va s'en sortir vivant, et pas ruinés.

Game Over


Il me fait ses petits calculs, je reprend calmement la parole. Alors, 400$ pour la pompe, mais si on compte l'interruption du séjour, les nuits d'hôtel supplémentaires, "maybe we can forget it ?"

Sourires, tout le monde est content, dans ma grande tradition du "je me fais avoir et je dis merci" c'est moi qui offre un thank you, et on repart, enfin, direction le mall pour acheter de quoi se saouler un peu.

Bon, ça nous a coûté cher, ça nous a fait rater le grand Canyon, ça fait de bons récits de vacances pour les années à venir, et finalement on s'en sort pas si mal. Et, pire, on ne leur en veut même pas ; comme avec un magicien ou une voyante, finalement, on a été, tout du long, un peu complices de ces arnaqueurs.

Cependant, si vous avez des idées pour leur rendre la vie pénible, ou faire en sorte qu'ils ne fassent plus trop de victimes, vous êtes les bienvenus.

On s'est quand même fait confirmer, plusieurs fois, qu'il y aurait une navette mercredi matin. On prendra quand même le numéro de quelques taxis, parce que j'ai moyen confiance...

Et le reste de la journée ?

Assez zen, finalement ; on a dormi sur la plage, bercés par les Alizés, dorés par le soleil, et la tête nourrie entre l'angoisse de la négo à venir (et que j'ai longuement contée) et celle du retour.

On a, au retour chez Jérôme, fait des courses au Vons, y compris la Pizza géante (spéciale dédicace à Sarah, on a la photo), et un peu de vin pour oublier tout ça.

Et depuis, tels des Saccomano de la location de voiture, on RRRRRRefait le match pour savoir comment, pourquoi, on a loué chez eux. Mais on est un peu saouls donc on a du mal à déterminer ça.

Les photos, la route, le programme du matin, tout ça ?



Y'en a pas, na !

8 commentaires:

SLip a dit…

Quelle histoire !!!!

romain blachier a dit…

excellent billet.La preuve que tout le monde n'estp as aussi bien ni aussi bon marché d'Ada Lyon centre, grand loueur de bagnoles pour aller faire des trucs pol devant l'éternel.

www.lyonnitudes.fr

JulieRose a dit…

Ah, des vacances sans plan galère et une road 66 sans breakdown, c'est pas vraiment des vacances, non?

Allez, ça fera plein de trucs à raconter en rentrant... Nous, les vacances qu'on a raconté à tous nos copains sont celles qui n'ont jamais eu lieu... Celles ou on s'est fait piquer notre voiture pleine à craquer à Bratislava. L'auberge de jeunesse new age, les policiers slovaques, les vieux restes d'allemand, le rapatriement en avion, tout ça tout ça. Après coup, ça ferait presque des bons souvenirs. En tous cas ça consolide un couple. ;)
Bises & see ya soon,
Julie & Nico

Cécile a dit…

coucou julie, coucou nico!

je vous avoue que depuis le jour ou on est tombé en panne, j'ai beaucoup pensé à vous: finalement, une petite panne de trois jours à Bryce Canyon, c'est même pas si horrible!
le souvenir de votre histoire nous a aidé à relativiser!
biz biz

Anonyme a dit…

ouf! j'ai un sacré rattrapage à faire vu que laurent vient de me donner l'adresse du blog (je n'avais que les albums photo!).
bon je file d'abord à la réunion de section et après, je lis TOUT!!
bises les tourtereaux
genevieve

Anonyme a dit…

Bon, heu... comment dire... euh... vous vous souvenez qu'on avait donné mon numéro et mon adresse au gars de la location ??... parce que j'ai comme qui dirait recu un coup de fil aujourd'hui...
Alors j'ai pas forcément tout compris, mais là il était question d'un autre patron (???), de gros pett sur la voiture, et bien évidemment de la water pump qui n'est pas estampillé "Ford Focus toute pourrie qui tombe en rade, hors-zone évidemment". Donc il en est revenu à un vieux deal de bon vendeur, après qu'il m'ait baratiné le coup de la Southern California, et encore un nouveau mileage, mais pour un total cette fois de 540$... Donc j'ai fait ce que j'ai pu, le coup de la bonne rigolade, de la voiture inadmissible, du legal department, le monsieur n'était vraiment pas facile. Donc je lui ai dit que je vous contacterais et il doit me rappeler lundi, surement avec de nouvelles merdes...
Donc disons, au cas où, un pti mail au banquier, ca mange pas de pain, si ce n'est pas déjà fait...
Voila, désolé j'ai fait ce que j'ai pu, je vous tiens au courant...

Anonyme a dit…

Bon, d'accord, c'est pas vrai, j'ai pas reçu de coup de fil, je voulais juste vous faire une ptite blague... (aussi paske je ss un peu bourré, je reviens d'une petite soirée barbecue sur un toît, super sympa, à La Jolla, avec vue sur la mer et petite brise du soir...)

Mais par contre j'aurais quand même bien aimé recevoir un pti coup de fil aujourd'hui, ca m'aurait bien fait marrer !!!

Bisous et bon courage pour la reprise !!!

Cécile a dit…

c'est malin, ça...
va décuver, petit coquinou!